Le gamin qui s’attaque à Facebook

Le gamin qui s’attaque à Facebook


(25/10/2011)

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

© Bortels

Max Schrems a 24 ans, de bonnes notions de droit et puis c’est tout. Mais il est bien parti pour faire chanceler l’ogre social…

LOS ANGELES Il a 24 ans, toutes ses dents, le vent dans le dos et peu de trouille au ventre. Il, c’est Max Schrems, Autrichien étudiant en droit de 24 ans bien décidé à mettre à jour les pratiques douteuses de Facebook, concernant les données que l’ogre social compile sur chacun de ses 800 millions d’adeptes.

L’histoire débute en juillet dernier. Dans le cadre d’un échange universitaire en Californie, Schrems a l’opportunité de rencontrer certains des responsables de Facebook. La discussion chavire vite – orientation des études de notre homme oblige – vers la politique de protection de vie privée que mène le site de Zuckerberg, et les différences de législation entre les États-Unis (laxiste, pour faire court) et l’Europe (plus regardante). “J’ai écrit un article sur ce sujet, et j’ai alors découvert que tous les utilisateurs de Facebook vivant en dehors des États-Unis et du Canada étaient liés par contrat à Facebook Irlande” . Facebook aurait, toujours selon Schrems, choisi la troisième plus grande île d’Europe comme point de chute “afin de bénéficier d’une fiscalité avantageuse” . Mais la conséquence d’une implantation dans le Vieux continent, c’est évidemment que “Facebook dépend des lois européennes sur la vie privée. Que bien sûr, il ne les respecte pas…” Le combat commence.

Partant du principe légal qui veut que chaque personne dispose d’un droit d’accès à une copie des données personnelles qu’une compagnie détient sur elle (directive 95/46/CE du Parlement européen), il prie Facebook de lui transmettre son fichier perso. Là, surprise : un CD-ROM lui arrive par la poste. Dessus, un fichier PDF long de… 1.222 pages ! “Tout, absolument tout, était conservé, même les données que j’avais effacées. Demandes d’amis rejetées, Likes, vieilles photos de profils, contenus des conversations privées, photos dont je m’étais détagué,… tout. Et même ce que je soupçonne être le profil-fantôme de non-membres.”

La suppression de données par l’utilisateur serait juste cosmétique, les serveurs de Facebook conservant tout, ad vitam. Pavé numérique dans la mare. “C’est illégal : la loi dit qu’une donnée supprimée doit être effacée pour de bon. Facebook nous demande d’être transparents sur nos vies, mais lui ne l’est pas du tout…”

Toujours fort de sa directive 95/46/CE, devenue depuis son livre de chevet, l’étudiant va plus loin. Il introduit, au Commissaire irlandais à la protection des données, pas moins de 22 plaintes contre Facebook. L’enquête suit son cours. Entre-temps, Schrems a créé un site web, Europe vs Facebook, établi en quatre langues, où il fait porter sa voix à tous les Facebookiens, les incitant à demander leurs données privées et à se questionner sur l’usage que Facebook fait des parcelles de vie que nous lui confions. 10.000 demandes de données auraient été rentrées depuis l’émergence du site, selon notre gaillard.

Max Schrems nie – peut-être un peu trop fort –, être motivé par l’argent dans ce combat sur papier bien inégal. “Je ne cherche aucun gain financier ou personnel. Je veux juste pouvoir aller sur Facebook, que j’aime et sur lequel tous mes amis sont, sans me soucier du traitement de ma vie privée” .

En tout cas, un truc est clair : ce que le réseau social fait de nos données privées… ne l’est pas. On continuera donc à le marteler : ne dites pas tout à Facebook.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]